Mémoire Résistance et Déportation dans les Côtes-du-Nord

Entre terre et mer

A la veille de la guerre, les Côtes-du-Nord, 531 840 habitants en 1936, vivent surtout des activités du monde rural. En 1946, à 81,6 % la population habite encore une commune rurale (2e rang après la Creuse). Pourtant, par vagues successives, l’exode rural vers la région parisienne a précocement et durement frappé ce département breton qui a perdu 110 000 personnes depuis l’apogée de 1866.

Hormis Saint-Brieuc, le tissu urbain n’est constitué que de cinq petites villes, de 5 à 12 000 habitants, vivant du commerce et de l’artisanat, sauf Guingamp qui compte plusieurs usines. Avec 31 640 hab. en 1936, Saint-Brieuc est le principal pôle administratif, commercial grâce au port du Légué et à son rôle de nœud de communications, et industriel du département. En 1939, la cité briochine concentre 37,6 % des entreprises et 49,1 % de la main d’œuvre ouvrière du département.

Mais ce terroir marqué par la ruralité possède aussi une façade littorale de 350 km, sans grands ports. Cependant, la proximité de l’Angleterre donne toute son importance stratégique à la côte nord de la Bretagne tant pour l’occupant qui va y édifier son Mur de « l’Atlantique » que pour la poignée d’hommes qui va tenter de rejoindre l’Angleterre par la mer.

C’est une société marquée par les pertes de 14-18 et atteinte par le vieillissement et une surmortalité masculine qui tient aux ravages de l’alcoolisme. En 1938, dans cette région catholique et nataliste, les décès l’emportent légèrement sur les naissances.

La grande majorité des ménages vit dans des fermes dispersées dans le bocage. Les conditions d’habitat sont encore souvent déplorables. Beaucoup de hameaux ne sont pas électrifiés.

En 1929, on recensait 72 400 exploitations agricoles, dont 47 % de petites (moins de 5 ha) et 7 % seulement de plus de 20 ha. On a souvent du mal à vivre de ce système de polyculture-élevage peu intensif, ce qui a obligé les enfants des petites fermes aux familles trop nombreuses à partir chercher du travail ailleurs. La crise agricole des années 1930 a accéléré la disparition de ces toutes petites exploitations.

Dans les exploitations à base familiale, la mise en valeur des terres se partage entre le faire-valoir direct et le fermage. Le métayage a presque disparu. Suite à l’enrichissement de 14-18, la mécanisation a fait des progrès dans l’entre-deux-guerres. Mais agriculteurs et artisans ruraux n’ont pas encore rompu avec les rythmes de l’économie paysanne traditionnelle.

 
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